Galerie d’art.
– LE POINT DE VUE DE LA RÉDAC’ –
Il y a un peu plus d’un an, le soir de la fête de la musique 2018, l’Atelier Véron ouvrait ses portes dans la rue du même nom. A l’origine de ce projet, on retrouve le sculpteur Jacques Tenenhaus, heureux propriétaire des lieux (et quels lieux !) depuis plus de trente ans. Car ce qu’on ne peut deviner, c’est que derrière l’espace galerie, particulièrement agréable avec ses murs de pierre, se cache un jardin secret où Jacques a installé son atelier et ses bureaux, qui furent autrefois une maison de plaisir puis un commissariat et un dépôt de meubles !
C’est justement parce qu’il n’appréciait pas trop le fonctionnement des galeries « classiques » que Jacques a eu envie d’ouvrir la sienne. A l’origine, l’Atelier Véron était ainsi un lieu principalement consacré à la sculpture, et les premiers artistes exposés, en plus d’être sculpteurs, étaient surtout des amis de Jacques. Progressivement, le champ s’est élargi, notamment avec l’arrivée d’Aurélie en septembre 2018. En avril 2019, elle organise durant trois semaines une première exposition de lithographies de l’imprimerie Mourlot, prélude à l’exposition actuellement présentée jusqu’au 15 octobre.
Fernand Mourlot est considéré dans le monde de l’art comme un maître lithographe. Pendant plus d’un demi-siècle, il a lié son nom à ceux des plus grands peintres du XXe siècle, parmi lesquels Matisse, Braque, Chagall, Miró ou encore Picasso, entre autres. Chez les Mourlot, l’imprimerie est une affaire de famille puisque le père, Jules, dirigeait déjà une imprimerie rue Saint-Maur avant d’acquérir celle de la rue de Chabrol, qui produisait des affiches de théâtre et de cabaret. A sa mort en 1921, ce sont ses fils qui reprendront l’affaire, mais c’est en 1930 que le nom de Mourlot commence à se faire connaître, quand Fernand réalise l’affiche de l’exposition Delacroix traitée à la manière d’une œuvre d’art, demandant aux artistes de travailler directement sur la pierre.
A partir de 1937, les plus grands noms vont se succéder chez Mourlot, grâce aux affiches réalisées d’après deux toiles de Matisse et de Bonnard pour l’exposition Les Maîtres de l’Art Indépendant au Petit Palais. En 1945, Picasso passera les portes de l’atelier et y travaillera sans relâche jusqu’en 1969, produisant plus de 400 lithographies à lui seul, et donnant ainsi une dimension nouvelle à la lithographie.
En 1967, le fils de Fernand reprend l’imprimerie familiale et en ouvre une seconde à New-York, avant la fermeture définitive de l’entreprise parisienne en 1999. C’est justement à New-York, où elle a travaillé une dizaine d’années, qu’Aurélie a rencontré Eric, le petit-fils de Fernand Mourlot, et c’est grâce à lui qu’en ayant accès au stock de l’imprimerie, elle a pu organiser cette exposition à Montmartre. Beaucoup des artistes ayant travaillé avec Mourlot ont un lien étroit avec notre quartier (Vlaminck et Utrillo furent d’ailleurs les premiers à venir rue de Chabrol), donnant encore plus de sens à cette exposition si besoin en était…
On peut aujourd’hui admirer à l’Atelier Véron des lithographies de Miró, Fernand Léger, Giacometti, Braque, Le Corbusier, Chagall, Matisse, Cocteau et même Picasso ; les admirer mais également les acquérir, les premières œuvres étant présentées à partir de 300€ !
En à peine un an, l’Atelier Véron a su s’imposer comme l’une des galeries majeures de la Butte, et d’autres expositions sont d’ores et déjà programmées, laissant toujours la part belle à la sculpture mais plus globalement à l’art contemporain sous toutes ses formes.