L’ambiance était tendue et la salle comble jeudi 18 octobre dernier pour la réunion publique sur le projet d’aménagement voirie de la Place du Tertre. L’affaire ne date pas d’hier, puisqu’il s’agissait de la troisième réunion publique en novembre 2017, la première ayant eu lieu il y a un an, provoquant une levée de boucliers et une mobilisation sans précédent de la part des peintres de la place, sacrifiés selon eux au profit des terrasses de plus en plus omniprésentes sur la Place. De nombreuses négociations ont eu lieu depuis entre les différents acteurs du conflit (urbanisme, élus, restaurateurs, riverains et artistes), le but étant bien entendu de trouver un compromis satisfaisant pour le plus grand nombre. Qu’en est-il alors aujourd’hui, sachant que le début des travaux est prévu pour le mois de novembre ?
Située en zone piétonne depuis 2006, la Place du Tertre attire principalement, hormis les riverains, les touristes du monde entier, faisant du site l’un des plus visités de la capitale. Le projet d’aménagement « vise à conserver le paysage urbain de la place et participe à la préservation de ce site caractéristique du vieux Paris ». Parmi les actions proposées, on notera :
- le recalibrage de la rue Norvins à 4m au droit de la Place du Tertre dans le prolongement de l’existant et le remplacement du pavage de granit gris par un pavé en grès brun et ocre pour uniformiser les couleurs avec l’existant
- l’élargissement du plateau central en droit de la rue Norvins d’une surface de 51m2 et une vue de bordure de 2cm pour l’accessibilité PMR
- la reprise du trottoir face au 10 de la rue Norvins
- le réhaussement du fil d’eau de la voie sud de la place pour rendre cet espace accessible aux Personnes à Mobilité Réduite
- l’amélioration de l’éclairage de la place avec l’ajout de deux candélabres, ainsi que le passage en plan climat de l’éclairage
- la suppression des 7 bornes escamotables de distribution de courant électrique
- le traitement des pieds d’arbres
- la mise en place, à la demande de la préfecture de police, de deux bornes escamotables contre les véhicules béliers (2020)
ainsi que différents travaux connexes visant à améliorer la sécurité et l’accessibilité à la place.
Ce que les peintres craignaient le plus, c’était de voir réduire encore plus leurs emplacements déjà minuscules autour des terrasses en période estivale. La bonne nouvelle, c’est que non seulement l’ensemble des voies autour du plateau ne sera pas réhaussé, mais les terrasses ont également accepté de reculer de 2m et de 20cm sur chaque bord est/ouest. Les emplacements des peintres seront ainsi redistribués, en réflexion étroite avec eux. Ces derniers restent malgré tout mécontents, demandant entre autre à ce qu’un passage soit créé permettant de traverser la place, tandis que la préfecture de police le déconseille plus que fortement en raison des risques liés aux attentats mais également aux pickpockets.
Car le nerf de la guerre se situe bien au niveau de ces fameuses terrasses, qui pour beaucoup de puristes dénaturent notre chère Place du Tertre. Il a cependant été rappelé que la place devait être ouverte à tous, et qu’elle devait vivre avec tous et pour tous. De nombreuses concertations ont eu lieu ces derniers mois, permettant de voir plus de 35m2 rétrocédés aux artistes. Ces terrasses ont toutes pour la plupart été octroyées il y a plus de 30 ans, et il n’était pas question pour la mairie de mener une fronde contre les restaurateurs. Il n’empêche que le pourcentage de terrain occupé par les uns ou les autres diffère selon les sources, et que malheureusement, quel que soit le compromis, celui-ci ne pourra malheureusement jamais satisfaire tout le monde.
Les petits travaux d’éclairage et de déplacement de bouches d’égout et de lavage auront lieu entre novembre et décembre, la « trêve des confiseurs » étant respectée durant les fêtes de fin d’année. C’est à partir du mois de janvier que les gros travaux de voirie commenceront, la fin de chantier étant prévue pour le mois de mars. Durant cette période, il a été proposé que les artistes puissent poser leurs chevalets rue Azaïs, au dessus du Square du Chevalier de la Barre.
Bien que les choses semblent évoluer dans le sens d’un ajustement profitable à tous, certains artistes de la Place du Tertre n’ont pas fini d’en découdre et ne comptent pas en rester là. Ce qui est certain, c’est que si le paysage évolue, l’engagement des montmartrois lui ne changera jamais ! Affaire à suivre donc…