Il y a quelques mois, c’est avec délice que la rue Houdon a vu s’ouvrir les portes d’une nouvelle épicerie, au bleu roi et aux étals colorés. Sandrine, la maîtresse des lieux, fait partie de ces montmartroises capables de parcourir des kilomètres à pied pour (mieux) manger. Mais ce qui l’a décidé à ouvrir sa propre boutique, c’est quand une voisine lui a dit : « Pour faire ses courses à Montmartre, c’est rue Lepic ou aux Abbesses, mais en allant vers Pigalle, à part le Monoprix, il n’y a rien de bien ».
À la réflexion, elle aussi en avait marre de devoir s’éloigner autant pour dénicher de bons produits. L’idée d’emplir elle-même ses étagères de gourmandises à la française et de pépites gustatives est un projet, qu’elle rêvait de concrétiser depuis longtemps. Agir au lieu de râler, changer les choses en mieux et placer l’exigence au rang de normalité, ça ne lui fait pas peur. Que ce soit en sortant de chez elle boulevard de Clichy ou en amenant sa fille à l’école maternelle de la rue d’Orsel, l’idée germe dans sa tête comme les légumes de saison qu’elle s’imagine vendre un jour. C’est décidé, c’est ici qu’elle ouvrira le L.A.B. Français, non loin de la place du Tertre, où ses parents (eux aussi du quartier) ont échangé leur premier baiser il y a des années.
Sandrine a toujours eu une vision assez négative du milieu de la grande distribution, pourtant ses parents travaillaient tous les deux pour une chaîne d’hypermarchés. Elle se souvient d’une époque pas si différente d’aujourd’hui, même si pour elle les choses se sont empirées depuis. La question qu’elle se pose ? Comment faire la part belle aux produits du terroir, made in France et aux circuits courts si les marges sont inexistantes et si les leaders imposent des baisses de prix drastiques ? Est-ce que nos matinées ne mériteraient pas plus de petits plaisirs quotidiens, comme de tartiner de la confiture au chaudron sur du pain d’épices fabriqué dans la région ? Pour ça, elle vous donne rendez-vous au 7 rue Houdon.
Ici, on joue la carte de la transparence et du sourcing responsable, pour faire en sorte que les habitants retrouvent le lien avec les commerces de proximité, à l’ancienne. Sandrine n’aime pas le terme d’épicerie fine et se considère plus comme une épicerie de qualité. Les prix y sont raisonnables, parce que la gourmandise se doit d’être accessible. Elle déniche régulièrement des fournisseurs en sillonnant l’Île-de-France et plus si affinités dès qu’elle a du temps libre, en visitant les marchés de producteurs ou en passant ses soirées à repérer les nouveautés sur des sites qu’elle utilise au quotidien : « La Ruche qui dit Oui ! » ou « Pour de Bon ». Une véritable vitrine pour les petits producteurs, qui trouvent au L.A.B. Français une jolie visibilité. En quelques mois, la petite épicerie est devenue une référence, comme le prouvent certains habitués qui se déplacent depuis la banlieue pour y faire leurs courses.
Mais parlons peu, parlons bien. Du moins, parlons peu, parlons gourmand. Ce petit marché de qualité propose tout ce dont vous auriez besoin : cave à vins, conserves en veux-tu en voilà, fruits et légumes de saison, charcuteries fines et fromages affinés… et même des produits de beauté !
La plus chouette découverte de cette fin d’année ? Le fameux flan pâtissier de la maison Savary. Loin de la consistance caoutchouteuse qui peut parfois rebuter dans certaines boulangeries industrielles ou en supermarché, on replonge en une bouchée dans ses souvenirs d’enfance et cette incroyable onctuosité qu’on avait oubliée. Côté nostalgie, on craque aussi pour les jus et les purées de fruits des Vergers de la Côte Marion qui feraient craquer n’importe quel client. Et qui permettent de renouer avec les saveurs des fruits d’été… en plein hiver. En plus de l’esprit local, Sandrine est passionnée de l’effet bocal, qui a la particularité de conserver à la perfection le goût des saisons, sans sucres ajoutés.
Mais les surprises ne s’arrêtent pas là, et il suffit de faire quelques pas vers le fond du magasin pour finir de remplir son panier. Que ce soit avec des produits de niche comme le sirop de safran ou avec des denrées aux bienfaits insoupçonnés comme le vinaigre de cidre biologique Archie. On en arrose ses feuilles de salade ou ses cheveux pour les faire briller, le côté multi-usages permettant d’éviter de surconsommer. Son acidité est si faible qu’il est même possible de le boire en cure pour avoir une peau éclatante. Si l’indice glycémique fait partie des choses contre lesquelles vous luttez au quotidien, pensez à demander où sont rangés les sirops de sucre de raisin Bourgoin, qu’on utilise comme du sirop d’Agave. Ou le Verjus de la même marque qui remplace le citron sur des huîtres ou un poisson. Parfait pour vos recettes de fêtes ! Et pour toute demande particulière, Sandrine essaie d’y répondre comme elle peut, prenant un délicieux plaisir à relever le défi. Elle n’oublie pas de surfer sur la vague hyper-locale en référençant du made in 18ème, comme les Conserveries des Sept Collines où les tartinables sont cuisinés par deux amis passionnés.
Si cet article vous a mis l’eau à la bouche, pensez à remonter ou descendre la rue Houdon côté impair. Vous ne serez pas déçu.