Niché au pied de la Butte, le Cimetière de Montmartre est le plus grand mais aussi le plus récent du quartier. Beaucoup de riverains et de touristes aiment s’y balader, tant son cadre est agréable, mais aussi parce qu’on y trouve beaucoup de sépultures remarquables et qu’y sont enterrées de nombreuses personnalités. Depuis le 29 avril 2024, il est d’ailleurs classé par décret parmi les sites de la Ville de Paris ; un classement qui vient reconnaître “un paysage urbain spécifique, dont la conservation présente, en raison de ses caractères pittoresque et historique, un intérêt général, et justifie une protection de niveau national.”
Sur un terrain propriété des Dames de l’Abbaye de Montmartre depuis le XIIe siècle, le cimetière de Montmartre fut formé à l’emplacement d’anciennes carrières de gypse. Faisant office de fosse commune durant la Révolution, les corps de trois cents Gardes Suisses tués aux Tuileries le 10 août 1792 furent entre autres déposés dans les galeries abandonnées. Ce n’est qu’en 1798 que l’administration parisienne en fit officiellement un cimetière, sur une surface d’un hectare vingt-sept. D’abord nommé Cimetière de la Barrière Blanche, puis Champ du Repos suite au projet extravagant conçu en 1799 par le citoyen Cambry, qui prévoyait de transformer Montmartre en une gigantesque nécropole réunissant la totalité des sépultures parisiennes, il prit finalement le nom de Cimetière sous Montmartre. En 1801. il est renommé Cimetière du Nord après l’arrêté du préfet Nicolas Frochot officialisant l’ouverture de trois nécropoles parisiennes : le Père Lachaise à l’Est, Montparnasse au Sud et Montmartre au Nord. Il ne devint définitivement Cimetière de Montmartre qu’après l’annexion de la Butte à Paris en 1860.
Fermé en 1806 puis rouvert le 1er janvier 1825, année de son officialisation, le cimetière de Montmartre n’a cessé de s’agrandir, pour atteindre une superficie de 10,48 hectares. Il accueille aujourd’hui 21 500 sépultures sur 30 divisions et 20 mètres de dénivelé. On y trouve également quelques 800 arbres de 38 essences différentes. Mais l’une de ses principales caractéristiques reste qu’il est enjambé depuis 1888 par le Pont Caulaincourt, premier pont en acier de Paris, construit pour faciliter l’accès à la Butte à l’occasion de l’Exposition Universelle marquant le centenaire de la Révolution.
Bien qu’il s’agisse du troisième plus grand cimetière intra-muros de Paris après le Père Lachaise et Montparnasse, son unique entrée se situe au 20 avenue Rachel. Il abrite deux sépultures classées, la Chapelle Fournier et la Chapelle Potocki, ainsi que de nombreuses sculptures remarquables, parmi lesquelles des oeuvres de Rodin, Rude, Granet ou Bartholdi. Plus de 350 personnalités du monde politique, des sciences, des arts et des lettres sont enterrées au Cimetière de Montmartre. Ainsi, la première tombe que l’on peut voir dès l’entrée du cimetière est celle de Sacha Guitry, homme de lettres et de théâtre. Parmi les autres écrivains, on peut citer Stendhal, les frères Goncourt, Georges Feydeau, Théophile Gautier, Emile Zola (dont le corps fut transféré au Panthéon en 1908), ou encore Alexandre Dumas fils. A noter que la courtisane Marie Duplessis, qui inspira le personnage de la Dame aux Camélias à ce dernier, est elle aussi inhumée au Cimetière de Montmartre.
Parcourir les allées du cimetière revient à feuilleter un libre d’histoire de l’art des XIXe et XXe siècles. On y croise ainsi les sépultures d’Edgar Degas, Fragonard, Jacques Offenbach, Adolphe Sax, Hector Berlioz, Léo Delibes, Nijinski, France Gall et Michel Berger, Fred Chichin, Pierre Barouh, Pierre Cardin, la famille Medrano, François Truffaut, Claude Autant-Lara, Louis Jouvet, Jean-Claude Brialy, Michel Galabru, ou encore Jeanne Moreau pour ne citer qu’eux. Mais la “star” du cimetière reste incontestablement Dalida, dont la tombe, surmontée d’une statue grandeur nature réalisée par le sculpteur Aslan, reste la plus fleurie du cimetière. Dans la même allée, on est également suivi du regard par l’étrange visage en trompe l’oeil du docteur Guy Pitchal, qui fut aussi le psychanalyste de Dalida.
Parmi les autres montmartrois célèbres, on peut citer la famille Sanson, bourreaux durant six générations et enterrés dans l’un des plus anciens caveaux du cimetière, Charles Henry Seveste, fondateur du Théâtre de Montmartre, le dessinateur Francisque Poulbot, Anatole le garde-champêtre ou encore Louise Weber plus connue sous le nom de La Goulue. En revanche, ne cherchez pas Michou, qui est lui enterré au cimetière Saint-Vincent un peu plus haut sur la Butte.