La Commune de Paris, on en a tous plus ou moins entendu parler, surtout à Montmartre. Mais combien d’entre nous seraient capables d’expliquer ce qui s’est exactement passé durant ces 72 jours qui ont marqué à jamais la capitale ? Pour vous, nous avons chaussé nos lunettes et rouvert nos livres d’histoire pour tenter de résumer de manière simple cette fameuse Commune de Paris.
Tout commence en 1870, lorsque les armées prussiennes envahissent le pays après la défaite de l’armée française à Sedan le 1er septembre. Les députés, réunis en urgence au Palais Bourbon, proclament la IIIe République, et les parisiens, nombreux à avoir réclamé la déchéance de l’Empereur Napoléon III, s’organisent pour défendre la ville contre l’envahisseur. Mais les armées prussiennes sont rapides, et le 19 septembre, la ville est totalement assiégée.
Le 7 octobre au matin, Gambetta, alors ministre de l’intérieur, s’envole en ballon depuis la Place Saint-Pierre de Montmartre pour rejoindre le gouvernement de défense nationale réfugié à Tours. Ce dernier tente de coordonner la libération de Paris, mais sans succès. Malgré l’humiliation, la famine et les bombardements aveugles, les parisiens résistent, jusqu’à ce qu’un armistice soit signé le 28 janvier 1871. Pour le peuple parisien, c’est un affront supplémentaire, celui-ci estimant s’être battu jusqu’au bout et ne pas avoir perdu contre les Prussiens.
La nouvelle Assemblée, élue à la hâte en février 1871, est majoritairement monarchiste, alors qu’à Paris, sur 43 députés, 37 sont républicains. Le fossé se creuse entre Paris et le reste du pays, encore très rural. La capitale compte alors 1,8 millions d’habitants, dont 57% vivent du travail industriel. La situation de la classe ouvrière est dramatique, et de nombreux parisiens vivent dans des conditions de misère extrême.
Face à une population très politisée et armée, le nouveau gouvernement présidé par Adolphe Thiers va multiplier les provocations : après avoir autorisé les Allemands à défiler sur les Champs Elysées le 1er mars, l’Assemblée, qui a préféré s’installer à Versailles plutôt qu’à Paris, jugée trop « rouge », supprime la solde de 1,50 franc des membres de la Garde Nationale, privant de revenus de nombreuses familles.
Alors que fin février, les canons des gardes nationaux, achetés en partie par souscription pour défendre la capitale, avaient été mis en sécurité dans divers lieux dont Montmartre, Thiers décide de les récupérer.
Le 18 mars avant l’aube, il envoie 4000 soldats sur la Butte pour les redescendre, mais la population se mobilise, et très vite, l’armée se retrouve encerclée par des centaines d’hommes, de femmes, parmi lesquelles Louise Michel, et même d’enfants. De nombreuses barricades sont dressées depuis la Place Blanche en passant par la rue Lepic jusqu’à la rue Myrrha, mais lorsque l’ordre est donné de tirer sur la foule, les soldats refusent d’obéir et fraternisent avec les Montmartrois. Les généraux Lecomte et Thomas, faits prisonniers, sont d’abord conduits au Château-Rouge, siège de la Garde Nationale dans le 18e, puis fusillés malgré l’intervention de Clémenceau, maire de l’arrondissement, devant le poste de la rue des Rosiers (aujourd’hui rue du Chevalier de la Barre), à l’angle de la rue de la Bonne.
Thiers quitte alors Paris pour Versailles, tandis que le Comité Central de la Garde Nationale envahit l’Hôtel de Ville et décide d’organiser des élections, au terme desquelles la Commune est proclamée le 28 mars, en référence à la Commune insurrectionnelle ayant mis fin à la monarchie en 1792. Paris essaie alors de s’organiser politiquement en constituant neuf commissions, où siègent des élus issus du peuple, ouvriers, artisans, journalistes, avocats ou artistes, tous républicains, socialistes ou anarchistes. Dans le 18e, on retiendra les noms d’Auguste Blanqui, Simon Dereure, Jean-Baptiste Clément et Théophile Ferré pour les plus connus. Alors que les ateliers de production sont réquisitionnés par les Communards et gérés par les ouvriers, la gratuité des loyers est instaurée durant quelques mois, l’école devient obligatoire et laïque, le salaire des instituteurs est multiplié par deux, et de nombreux clubs de discussion sont créés, auxquels participent aussi bien des hommes que des femmes.
Pour autant, pas question pour le gouvernement de Thiers de se laisser faire, et durant plusieurs semaines, les combats font rage aux portes de la capitale. Le 21 mai, les Versaillais, au nombre de 130 000, finissent par entrer dans Paris. La lutte est inégale entre l’armée et les fédérés, mal organisés, et durant ce que l’on a appelé la Semaine Sanglante, Paris est à feu et à sang : les monuments brûlent, les exécutions sont nombreuses, jusqu’au 28 mai où tombe la dernière barricade.
La Commune de Paris, qui n’a duré que 72 jours, a fait près de 20 000 morts, et plus de 40 000 personnes ont été emprisonnées ou déportées vers la Nouvelle Calédonie. Mais elle a profondément marqué les esprits, et a contribué à l’émergence de concepts novateurs, notamment en matière d’égalité hommes-femmes et de laïcité. C’est dans ce contexte particulier qu’a été décidée la construction de la Basilique du Sacré Cœur sur la Butte Montmartre en 1873, donnant lieu à la thèse développée par certains historiens de l’expiation des « pêchés » commis en 1871. Mais ceci est une autre histoire…