Peut-être avez-vous remarqué en vous baladant rue La Vieuville les cœurs peints sur le mur de la Cité de la Mairie. Cette fresque, pleine de couleurs et de poésie, c’est à Juliette B’art qu’on la doit ; une artiste aux multiples talents qui peint chez elle dans son atelier de la Cité Montmartre aux Artistes depuis près de 25 ans, mais aussi de plus en plus sur les murs de notre quartier.
Parce que les cœurs, c’est universel, Juliette a décidé d’en faire son moyen d’expression fétiche, et sa fresque en est la plus belle preuve. A la base, c’était juste un cœur qu’elle avait collé peu de temps après la pandémie sur le mur du restaurant Marcello, en hommage à tous les disparus… Et puis petit à petit, elle a rajouté d’autres cœurs, qu’elle s’est mise à peindre au pinceau directement sur le mur, et qui semblent aujourd’hui s’échapper d’un autre Cœur, Sacré celui-là, pour rejoindre les centaines de Je t’Aime du Mur du même nom dans le Square des Abbesses. Chaque cœur est unique, travaillé sur du papier de soie marouflé et vernis lorsqu’il n’est pas peint directement sur le mur ou un support, qui peut-être du bois pour pouvoir être vendu comme un objet d’art brut, ou comme ceux que l’on trouve chez Résidence Secondaire à quelques pas de là.
Des cœurs, Juliette en a déjà peint et collé ailleurs en France, notamment sur la piste cyclable reliant Bordeaux à La Rochelle, même si Montmartre reste sont terrain de jeu favori. Ce qu’elle aime dans la rue, c’est qu’on y rencontre toutes sortes de gens avec qui il est possible de dialoguer, souvent avec beaucoup de bienveillance, même quand ça ne plait pas ; c’est sans doute ça la magie des cœurs ! « Le street-art est un formidable moyen d’expression, au même titre que lorsque les afro-américains ont commencé à faire des claquettes dans la rue, puis du rap ou du hip-hop. Exercer son art dans la rue, c’est une manière d’assumer d’y être pour ne pas vouloir y dormir. Il faut donc accepter de recevoir le meilleur comme le pire ».
Et en matière de danse, Juliette sait de quoi elle parle puisqu’elle a d’abord été danseuse professionnelle, en plus d’avoir exercé plein de petits boulots dans le milieu de la mode et du cinéma. Mais c’est suite à un pépin de santé qu’elle a décidé de se consacrer exclusivement à la peinture. Et si dans la rue elle ne peint que des cœurs, sur toile ce sont plutôt des scènes de vie ou des portraits transposés : « le fait d’être autodidacte me permet d’exprimer des sentiments ou des situations sans avoir besoin d’être inspirée par un tel ou une telle juste pour faire un joli tableau. Quand on est artiste, il faut surtout beaucoup travailler ». Un travail qui paie, et qui lui a entre autre permis d’exposer à la Halle Saint-Pierre en 2016, et plus récemment à la Galerie Henri Landier rue des Trois Frères.
Si l’artiste assume son côté un peu solitaire lorsqu’elle travaille, notamment vis-à-vis des street-artistes, elle adore à contrario mettre en avant d’autres talents au travers d’expositions qu’elle organise régulièrement, chez Pradel rue Ordener et à Bastille, et peut-être bientôt à la Maison Milie rue La Vieuville, où elle vient également de commencer à peindre des cœurs, comme un prolongement naturel à la fresque de la Cité de la Mairie ; une fresque qu’elle rêverait de ne jamais finir pour pouvoir y revenir souvent, comme un livre de vie à ciel ouvert dont le dernier chapitre ne s’écrirait qu’à la fin de sa vie ; c’est tout ce qu’on lui souhaite.