Depuis le 9 septembre dernier, l’Espace Dali propose une exposition totalement originale puisque, pour la première fois, le dessinateur de BD Joann Sfar expose ses dessins dans un établissement muséal. Plus de 200 dessins originaux, extraits de la BD Fin De La Parenthèse, que Sfar a réalisée en hommage à Dali, sont à découvrir parmi les œuvres du maître catalan jusqu’au 31 mars prochain.
L’exposition est complexe et livre plusieurs niveaux de lecture. Mais elle permet de réaliser à quel point la rencontre entre Sfar et Dali était évidente. Joann Sfar, connu pour sa BD Le Chat Du Rabbin, ou encore le film Gainsbourg Vie Héroïque, est un artiste brillant et érudit. Formé aux Beaux-Arts, il découvre Dali vers l’âge de 18 ans, d’abord en tant que théoricien ; « la première fois que j’ai vu Dali à la télé, je me suis dit que je voulais être ce type là parce qu’il s’amusait ». Ainsi, il ne s’intéresse pas à sa peinture mais plus à ses écrits, à sa façon d’être et de penser. C’est à l’occasion du travail effectué pour l’exposition que Sfar a finalement réalisé qu’il connaissait en fait toutes les œuvres de Dali depuis toujours, mais qu’il ne les voyait que comme des images. Et c’est en les regardant vraiment qu’il les a comprises et qu’elles ont fini par le bouleverser : « je suis persuadé que rien n’est plus vivant que l’émotion qui vous retourne au moment où vous comprenez enfin une peinture que vous avez sous les yeux depuis toujours ».
Joann Sfar nous propose ainsi un chemin dessiné dans ce qu’il s’imagine être le cerveau de Dali, qui lui permet de commenter à sa manière l’œuvre du maître, et c’est à la fois déroutant et fascinant. Résultat d’une année de travail, tout ce qui a été écrit et dessiné l’a été pour être exposé. Toutes les planches sont en noir et blanc, ce qui leur confère une force vive permettant d’exprimer tout le talent et la sensibilité du dessinateur. C’était très important, car il n’a jamais été question pour lui de se prendre pour un peintre, mais bien pour un dessinateur de BD ; une discipline aujourd’hui reconnue et qu’il enseigne pour le première fois aux Beaux-Arts, où il a lui-même été élève.
On retrouve ainsi ces planches dans la BD Fin De La Parenthèse, où le héros-artiste Seaberstein participe à une expérience artistique durant laquelle il est chargé de réveiller le seul prophète non-religieux possible, Salvador Dali. Il devra pour cela invoquer son esprit grâce aux mises en scènes de quatre modèles de haute-couture qui recomposent les tableaux de Dali. C’est pourquoi on peut également admirer dans le parcours de l’exposition les robes de la Maison Schiaparelli qui ont inspiré Joann Sfar pour son récit. Une bande sonore originale a également été composée pour l’occasion par Olivier Daviaud, qui accompagne le visiteur et le plonge dans l’univers imaginé par l’artiste.
S’il faut du temps pour comprendre l’œuvre de Dali, on vous conseille également de prendre votre temps pour visiter l’exposition, au risque de passer à côté de beaucoup de choses, messages et autres symboliques, voire de passer complètement à côté.